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  • Photo du rédacteurMaurice Amaraggi

Pourquoi ce blog sur Salonique

Dernière mise à jour : 30 juil. 2020

En 2006 j’ai réalisé un film documentaire dont le titre était « Salonique, ville du silence ». Beaucoup de choses ont changé en quatorze ans. Le film s’interrogeait sur le silence de l’histoire officielle des cinq cents ans de présence juive majoritaire dans la ville, surnommée « la Jérusalem des Balkans » sous l’empire ottoman. La langue vernaculaire était le judezmo, appelé à tort ladino, langue forgée à partir de l’espagnol et du portugais parlés par ceux que les rois catholiques de la péninsule ibérique avaient bannis.

Aucun monument n’avait été érigé sur le lieux de l’ancien cimetière juif à la place duquel s’est construit au fil du temps l’Université Aristote.

Le mémorial à la déportation avait été érigé à la périphérie de la ville où, malgré son éloignement il était régulièrement souillé. Dans le film, je formais le vœu de le voir installé au milieu de la Place de la Liberté, face à la mer, là où les hommes juifs furent humiliés et recensés en juillet 1942, premier acte du modus operandi de la déportation.

C’est aujourd’hui une chose presque faite. Le Mémorial a été déplacé sur le trottoir en bordure de place. Malheureusement, celle-ci qui fut si centrale dans l’histoire de la ville reste une sorte de chancre occupé par les voitures. Un projet existe qui expulsera ses voitures et restaurera le lieu tel qu’il doit être.

Peut-être alors le mémorial bougera-t-il une fois de plus pour enfin atteindre sa destination finale.

La résistance à l’érection d’un monument rappelant la présence du cimetière juif sur le site de l’université s’est elle aussi, finalement brisée et la ville a commencé à évoquer ce passé qui ne s’inscrit pas dans le roman national grec traditionnel.

Le film est donc devenu lui-même une sorte d’archive dont une séquence me tient particulièrement à cœur, celle où Renée Saltiel, dernière propriétaire avec son fils de la Librairie Molho véritable institution de la ville, me livre ses souvenirs et ses appréhensions. Après plus de cent ans d’existence, la librairie a aujourd’hui disparu.

Le problème du manque d’archives pour retracer ce passé et plus particulièrement l’extermination des juifs de la ville m’a toujours marqué. J’ai pu consulter les archives de la ville où se trouvent les exemplaires des journaux collaborationnistes. Ils tombaient en lambeaux. L’archiviste me disait qu’il n’était pas rare que certains qui consultaient ces reliques, en coupent un morceau.

Les archives de la communauté juive étaient inexistantes. Heureusement ceci a changé et un travail remarquable d’indexation est réalisé par Aliki Arouh et, jusqu’à récemment par Rena Halegou. Son grand-père Jacob, un ancien combattant de la guerre albano grecque et survivant d’Auschwitz, homme remarquable par sa gentillesse et sa bonne humeur, a toujours été très proche de ma famille.

Depuis peu et avec retard les historiens publient des textes sur cette période terrible et la ville, à travers ses musées donne à voir ce passé qu’elle voulait occulter générant ainsi un tourisme mémoriel.

Cependant, à ma connaissance le problème des archives reste entier. L’idée de ce blog vient de ce manque. Alors qu’on commémore le soulèvement du ghetto de Varsovie, j’ai vu, postées chaque jour par Tal Bruttmann de courtes notices biographiques rappelant le combat désespéré des juifs du ghetto de Varsovie. Ces posts m’ont renvoyé vers ce que je sens, peut-être à tort, comme un manque dans l’histoire de Salonique. Ce blog est donc ouvert avec un appel à tous ceux qui souhaiteraient y participer par des évocations, des photos, des documents, des points de vues.

The film is also available in English on vimeo: https://vimeo.com/ondemand/saloniquevilledesilence/413222673



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